Les « premiers vers » de Francis Yielé-Griffin datent des années 1885 et 86 ; ils forment deux petits volumes : la Cueille d'Avril et les Cygnes (1). L'auteur n'a pas réimprimé le premier dans l'édition de ses oeuvres complètes et s'il conserve le second c'est à cause, laisse-t-il entendre, d'un peu de tendresse qu'il a pour ces « vieux doux vers » :
Celles-ci, je ne sais, malgré que l'Art hautain Accueillit d'un sourire indécis nos prémices,
Valent comme un baiser, comme une odeur de thym Et comme un jeu de flûte où vont des doigts novices.
Assurément, il n'est pas, dès ce début, en pleine possession de son talent. Mais on le trouve, alors déjà, conscient de quelques-unes des idées qui lui tiendront toujours à coeur.
Dans le poème initial de toute son oeuvre, il proteste contre deux tendances littéraires, qui sont celles-là mêmes, en effet, contre lesquelles se dressait la jeune école : le réalisme et le pessimisme, — du moins, cette forme de réalisme qui était de mode encore en 1885, et l'espèce de pessimisme qui en résultait comme l'écoeurement tout naturel né de tels spectacles :
(1) La Cueille d'Avril parut chez Vanier, 1886, en une petite plaquette ; elle ne doit pas être confondue avec les poèmes qui sont intitulés ainsi dans le volume des Poèmes et Poésies (Mercure de France, 1895). Ceux-ci sont la réimpression des Cygnes qui avaient paru d'abord chez Alcan-Lévy, en 1887. C'est-à-dire que VieléGriffin semble retrancher de l'édition, définitive de ses oeuvres complètes ses tout premiers vers, dont une pièce seulement est conservée, Dea, qui remplace un poème intitulé Triplici dans les premiers Cygnes.