avant-goût des époques caniculaires, et voilà, je vous le dis, qu'on va penser bientôt aux moments où il fera trop chaud
L'année dernière, on était à Vivières à cette époque-ci et c'est le temps où j'ai monté la garde devant le portail d'Henri Bataille. Il pleuvait en ce moment, si j'ai bonne souvenance, et j'ai été, pendant ma garde, plus souvent sous la guérite qu'à côté. C'est alors que je venais d'être nommé vice-président de la Société des Gens de lettres. Maintenant je suis remplacé depuis plusieurs jours à la vice-présidence, mais les jours sont radieux. Puisse-je avoir souvent dans la vie des jours aussi beaux, et des honneurs aussi légers à porter que le fut cette vice-présidence 14 avril içiô.
Mon pauvre petit coco,
Si je pouvais vous insuffler un peu du calme avec lequel je vois les événements se dérouler, du moment que rien ne peut en modifier le cours. Et puis, il y a une idée qui s'ancre de plus en plus en moi, c'est que vraiment il y a trop d'hommes qui ont, bêtement, voulu et préparé la guerre actuelle, et que mes contemporains vous savez la piètre idée que j'ai d'eux ont fait tout ce qu'ils ont pu pour que ce qui est arrivé arrive. Quand on vient nous dire c'est l'Allemagne qui a attaqué, on a raison. Mais quand on ajoute que nous étions des petits saints qui honoraient et pratiquaient le pacifisme et que jamais oh mon Dieu nous n'avons eu des idées de revanche et de triomphes militaires et que jamais nous n'avons commis vis-à-vis de l'Allemagne le moindre acte d'hostilité et de provocation on « attige un peu la cabane » comme on dit ici. La crise actuelle est l'aboutissant logique et fatal des vanités nationales, et que chacun en prenne sa part