Le regretté Octave Hamelin avait coutume de dire que « le propre de l'historien est de savoir'; mais que le propre du philosophe est de comprendre.». Cette parole, venant d'un philosophe, soucieux g d'absorber dans sa pensée toute l'histoire de la pensée antérieure, atteste une immense ambition à la fois de savoir et de comprendre ce savoir, dont personne ne dira que chez Hamelin elle ait été déplacée. Peut-être cependant ne rend-elle pas justice suffisamment à l'effort t que les historiens ont fait pour se rendre compte des conditions sous lesquelles leur science est possible. Le présent exposé voudrait montrer que le travail des historiens conduit par lui-même à des S résultats philosophiques. Il faut de la philosophie non seulement à •' S! l'historien qui restitue les faits et qui, pour les extraire des témoi- gnages où est conservée la trace de ces faits écoulés, est obligé s de les comprendre. Il en faut davantage à l'historien soucieux j d'établir entre les faits restitués un lien qui ne peut être qu'un lien d'intelligence.
Le xixe siècle entier, depuis l'écroulement des systèmes de « philosophie de l'histoire » est rempli de ces tentatives de philo- sopher sur le savoir historique. Dans ce qui suit on ne parlera que des historiens et des philosophes vivants. On partira de la crise que S subit l'historiographie allemande dans les années qui séparent la mort de Marx (1883) et de Ranke (1886) et la mort de Jacob Burckhardt (1897). Ranke a été un historien purement descripteur, préoccupé dé retracer « tels qu'ils ont été -réellement » les actes individuels des hommes et les faits de l'histoire politique. Burckhardt a aimé à retrouver les linéaments généraux qui font le caractère a 1. Conférenee prononcée à l'École des Hautes Études Sociales.
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LA PHILOSOPHIE DES SCIENCES HISTORIQUES
DANS L'ALLEMAGNE CONTEMPORAINE1 a
Revue de
1912 Ni
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Numéro 2
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